Quelle qu’en soit la forme, la vie consacrée, que nous fêtons le 2 février, comme tout état de vie et tout charisme, n’est pas un en-soi. Elle est pour l’Église et pour sa mission qui est d’annoncer l’évangile du Royaume de Dieu. Vatican II souligne fortement cette finalité lorsqu’il déclare que la vie consacrée, bien que ne se situant pas dans la structure hiérarchique de l’Église entre les ministres ordonnés et les laïcs, appartient inséparablement à sa vie, à sa mission et à sa sainteté. Elle contribue, selon sa spécificité, à la sanctification du Peuple de Dieu et de chacun de ses membres quel que soit son état de vie et sa mission particulière. Au sein de l’Église, elle est une invitation permanente à progresser dans la suite du Christ, à garder le cap de l’amour filial envers Dieu et de l’amour fraternel envers tous. Elle appelle les ministres ordonnés à accomplir les tâches de leur ministère dans cet esprit, et les laïcs à vivre de même leur vocation de témoins du Christ dans le monde. C’est dire l’importance de la vie consacrée pour une Église locale. Dans l’exhortation apostolique sur la vie consacrée, Jean-Paul II allait jusqu’à affirmer que la conception d’une Église composée uniquement de ministres ordonnés et de laïcs ne correspondrait pas aux intentions de son fondateur qui a appelé certains à tout quitter pour le suivre. En se sens, ajoutait-il, elle en est un élément constituant et irremplaçable qui ne pourra jamais lui faire défaut.
N’est-il pas paradoxal de constater que c’est au moment où les communautés religieuses se font moins nombreuses et plus âgées, moins investies dans des responsabilités ecclésiales et des activités sociales, que nous redécouvrons ce qui fait le cœur et le caractère irremplaçable de la vie consacrée : contribuer par une présence le plus souvent humble et discrète à ce que tous les membres de l’Église progressent dans la sainteté qui est leur vocation commune et soient ainsi mieux à même d’annoncer l’Évangile ?
Mais la mission de la vie consacrée ne se limite pas à l’Église. Elle est aussi pour le monde. Si la fermeture d’un monastère ou le départ d’une communauté suscitent des réactions attristées ailleurs que dans l’Église, c’est que leur présence et leur mode de vie signifient et annoncent quelque chose d’important à un monde en quête de sens, de spiritualité et de fraternité. Pensons aux petites fraternités insérées dans les quartiers populaires, souvent seules présences chrétiennes dans des immeubles habités par des personnes et des familles en grande précarité et majoritairement musulmanes. C’est cette signification et cette place de la vie consacrée dans l’Église et dans le monde que perçoivent plus ou moins clairement tous ceux qui se désolent de voir partir une communauté ou fermer un monastère. C’est cela qui mobilise des équipes d’animation paroissiale et des évêques qui ne peuvent se résoudre à l’effacement de la vie consacrée dans des zones de plus en plus vastes de leur diocèse.
Le peuple chrétien dans son ensemble se sent très concerné par l’avenir du ministère des prêtres parce qu’il a besoin d’eux, notamment pour la célébration des sacrements. Se sent-il autant concerné par celui de la vie consacrée ? L’un et l’autre sont aussi essentiels à la vie de l’Église. L’avenir de la vie consacrée nous concerne donc tous. Les difficultés que rencontrent actuellement nombre d’instituts ne doivent pas faire douter de cette conviction qu’elle appartient à la nature intime de l’Église et à sa mission. Don de Dieu à son peuple, elle est importante pour la réalisation de notre vocation chrétienne. Si des formes de vie consacrée s’effacent, d’autres surgissent, les unes proches des anciennes, les autres plus originales qui doivent prendre le temps et les conditions de la maturation. « Éternelle jeunesse de l’Église », écrivait encore Jean-Paul II.
Père Christophe Chatillon
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